3 questions à Jean-Philippe Lefèvre, président de la Fédération nationales des collectivités pour la culture (FNCC), vice-président du Grand Dole (39)
Pourquoi la FNCC a-t-elle décidé d’engager une campagne d’adhésion ambitieuse à l’attention des communes rurales ?
Il y a bien des années que la FNCC a constitué son réseau des communes rurales, et dès 2006 nous avions édité un guide « l’élu rural et la culture ». Aujourd’hui, il faut prendre en compte un phénomène nouveau : la montée en puissance de la compétence « culture » dans les communautés de communes rurales. Là où la question culturelle et artistique semblait réservée aux pôles urbains ou aux bourgs, elle s’est naturellement imposée comme outil du lien entre les habitants, voire comme outil d’attractivité du territoire. On a vu se multiplier dans les petites communes, des élus délégués ou dédiés à la commission culture de leur intercommunalité. La FNCC a pris en compte cette évolution et cherche désormais plus encore à répondre à des besoins nouveaux.

J’ajoute, que comme beaucoup, je suis élu d’un territoire rural (agglomération de 55000 habitants mais avec 47 communes dont la ville centre de 24.000 h), j’avais été scandalisé par le « rapport Latarjet » qui nous avait gratifié d’une cartographie grotesque, où les « zones » qui n’étaient pas dotées d’une institution « à label » ou qui ne bénéficiaient pas d’une subvention du ministère de la culture se voyaient qualifiées de zones blanches ! Quelle méconnaissance de notre pays dans ses profondeurs. Comment ne pas lire la presse quotidienne régionale les lundis ou mardis matin sans découvrir, ici un concert d’harmonie ou de fanfare ; là une pièce portée par des amateurs ou encore une exposition de peintre locaux ! On parle des « droits culturels » ? Mais les voilà les droits culturels ! Une pratique artistique du quotidien qui commence dans le loisir et parfois se termine par une carrière professionnelle ou l’ouverture d’un lieu permanent parce que justement les élus de proximité en ont saisi toute l’importance !
Comment la FNCC se saisit-elle des spécificités de la ruralité en matière de politique culturelle, où le maire et son équipe sont souvent directement aux affaires ?
C’est un sujet que ne nous est pas inconnu… car nous avons autour de la table du CA, bien des élus ruraux qui sont limités dans leurs ambitions culturelles par manque de moyens humains ou financiers et qui réussissent grâce à leur engagement personnel, à la mobilisation des bénévoles et aux bouts de ficelle ! Nous adaptons notre offre de formation à ces élus-là : comment transformer une salle polyvalente en salle de spectacle…, espoir et écueil de l’itinérance culturelle…, la résidence d’artistes en milieu rural…, adéquation commune/com com…, le statut des agents partagés…
Notre newsletter « culture à vif » va s’attacher à rendre plus lisible chaque semaine des exemples propres aux dynamiques culturelles des territoires ruraux. Je pourrais vous parler de ma microfolie embarquée dans un bus, comme d’autres pourrait vous évoquer leurs orchestres à l’école ou tel bistrot de village devenu un centre culturel local.
Enfin, en tant que président, je bouge… je vais à la rencontre de tous ces élus des territoires. Cet été, en m’appuyant sur nos adhérents, ce sont plus de 30 élus à la culture de toutes petites communes ou de petits EPCI que j’ai rencontrés dans l’Ouest et le centre France. L’hiver dernier ce sont tous les élus à la culture de Martinique que j’ai côtoyés en animant des séances de formation. Et croyez-moi j’ai bien l’intention de poursuivre mes périples. Ce n’est pas qu’une ambition présidentielle, c’est celle de tout un bureau. Le trésorier national va chausser ses baskets dès l’automne !
La FNCC cultive des liens de coopération régulier avec l’AMRF : en quoi cette démarche préfigure-t-elle un lien renouvelé du plaidoyer de la FNCC à l’attention des espaces ruraux ?
AMRF et FNCC cultivent chacune leurs spécificités. L’AMRF a une vocation généraliste, et dieu sait si les sujets abondent en ce moment, ne serait-ce que si l’on évoque le ZAN… La FNCC est « spécialiste », nous avons l’expertise et la capacité de mobilisation dans un domaine précis. J’en prends pour preuve nos interventions autour de la question de la bonne gouvernance culturelle entre le niveau intercommunal et le niveau municipal.
Les maires ruraux ont souvent la tête dans le guidon tellement ils sont accaparés par leurs multiples tâches et leur mandat ; à la FNCC nous avons cette possibilité de sortir la tête de l’eau, et de prendre de la hauteur (pas trop non plus, nous n’avons pas la tête dans les nuages !). Notre ambition n’est surement pas de nous substituer mais d’être un espace ressource spécifique pour nos adhérents mais aussi pour toutes les associations d’élues partenaires.
Nous avons une convention de partenariat AMRF/FNCC, et je suis bien décidé, avec le bureau, à la faire vivre plus encore. Si je devais résumer : utilisez-nous, inventons ensemble !